CAPUCINE VEVER

LE SAUT DU BERGER, 2017
Pin, cèdre, acier, zinc, clous, lettre - 474 cm (L) x 200 cm (l) x 189 cm (h).
© Tito Iaffola


Telle une présence fantomatique, les loups des Abruzzes rôdent à proximité de Villalago, comme dans les autres villages des Apennins. Redoutables prédateurs, difficilement repérables, c’est au lever du jour que sont découvertes les traces de leurs passages. Espèce en voie de disparition, on dénombre entre 500 à 800 loups des Abruzzes vivants. À l’affût, ils s’attaquent fréquemment aux troupeaux d’élevage en parfaite santé et les bergers n’ont d’autre choix que d’être spectateurs de ces carnages à répétition.
Les loups agissent ainsi car, dans ces montagnes, ils ont faim. Depuis la disparition du pastoralisme, l’une des traditions d’élevage la plus ancienne qui soit, ils sont privés de leur moyen de subsistance. Ne pouvant plus endosser leur fonction de «régulateur» d’animaux, affaiblis ou malades; les loups descendent aux abords des villages pour s’attaquer aux brebis entassées dans les bergeries, en tuant plusieurs à la fois. « Paradoxalement, c’est l’élevage pastoral, l’une de nos agricultures les plus respectueuses de la biodiversité, reconnue en outre comme productrice d’une variété de services écosystémiques, que les loups, parés du statut de protection stricte, menacent de faire disparaître. » *

Convaincus de l’urgence de retrouver un équilibre dans la chaîne alimentaire et désireux de revenir à une cohabitation pacifique entre animaux sauvages, éleveurs indépendants et milieux exploités; les bergers des Abruzzes prônent le retour au pastoralisme et à la transhumance. Ils se heurtent cependant au mur de silence et à l’inaction des autorités qui, sous couvert de défendre la sauvegarde du loup, l’instrumentalisent en réalité - le loup étant devenu le meilleur allié de la destruction de l’élevage pastoral au profit des intérêts économiques de l’élevage intensif et du développement du tourisme.

Prenant comme point de départ ces problématiques locales, l’installation mobile Le saut du berger** s'inspire des différences anthropologiques entre le pastoralisme italien et français. Alors que les bergers des Abruzzes transitaient par des cabanes de pierre sèche éparpillées dans les montagnes, les bergers français effectuaient la transhumance de leurs troupeaux à bord de cabane-roulotte en bois. L'installation  Le saut du berger est un refuge reprenant la mobilité des cabanes françaises et surmonté d’une toiture à un seul versant, architecture typique des refuges aux alentours de Villalago. Pensé pour accueillir deux personnes souhaitant y passer la nuit, Le saut du berger est un abri nomade accessible à tou·te·s, un lieu d'observation et d'écoute de la faune et la flore du parc National des Abruzzes.



* Extrait du texte Loups: plaidoyer pour des écosystèmes non désertés par les bergers, rédigé par un groupe de scientifiques et paru le 12 octobre 2014 dans la Tribune de Libération.
** Le saut du berger reprend le titre d’une nouvelle de Guy de Maupassant écrite en 1882.



LETTRE OUVERTE DE BERGERS DES ABRUZZES ÉCRITE LE 25 OCTOBRE 2010 ET AFFICHÉE DANS L'INSTALLATION.
Version FR plus bas.



VERSION FR DE LA LETTRE OUVERTE DE BERGERS DES ABRUZZES ÉCRITE LE 25 OCTOBRE 2010 ET AFFICHÉE DANS L'INSTALLATION.

LE SAUT DU BERGER

2017

474 cm (L) x 200 cm (l) x 189 cm (h).
Matériaux : Pin, cèdre, acier, zinc, clous, lettre.


Installation In-situ, permanente et mobile, à proximité du Lac San Domenico, parc National des Abruzzes (Italie).



Exposition:
Réalisée dans le cadre du projet Eremi Arte qui reçoit le soutien de l’Académie des Beaux Arts de L’Aquila. Curators: Maurizio Coccia, Marco Cianciotta, Enzo De Leonibus et Silvano Manganaro, ABBRUZO (Italie).